ACTIONS GOUVERNEMENTALES
La souveraineté inaliénable de chaque pays confère une responsabilité majeure à son gouvernement dans la lutte contre le trafic de faux médicaments. ?
Autorité législative, judiciaire et exécutive, chaque état se doit d’élaborer les stratégies et de prendre les mesures adaptées à sa situation pour assurer la protection sanitaire de ses citoyens.
S’il n’existe pas une solution idéale applicable à tous, les initiatives des uns peuvent éclairer les pratiques des autres.
« Il n’existe pas de moyen simple et unique d’éliminer le problème. Chaque pays doit donc élaborer sa propre stratégie en fonction de sa situation, de l’ampleur du problème, des infrastructures disponibles et de ses ressources, humaines entre autres. »
Cette mise en garde contre toute approche simplificatrice était formulée dès 2000 par l’OMS au sein de son « Guide pour l’élaboration de mesures visant à éliminer les médicaments contrefaits ».
Recueil de recommandations et de mesures, ce guide propose à chaque pays une ligne directrice et des points fondamentaux pour élaborer son plan d’action national.
Loin d’être exhaustive, la liste des mesures gouvernementales suivante permet de dresser un panorama des principales initiatives prises par certains pays pour renforcer la lutte contre les faux médicaments.
Ces initiatives peuvent prendre diverses formes : mesures règlementaires, réformes d’organisation, actions ponctuelles…
La mention de ces actions sur cette page ne présage pas de l’intensité avec laquelle elles ont été mises en œuvre concrètement, ni de leur efficacité réelle.
Ces mesures sont exemplaires d’une intention allant dans le sens des recommandations de l’OMS.
- Renforcement et rationalisation de son système de réglementation : modification de la loi sur les affaires pharmaceutiques (PAL) pour y inclure une classification fondée sur le risque des produits, révision des normes de contrôle de la fabrication, amélioration de la surveillance après leur commercialisation…
- 2005 : Création de la Pharmaceuticals and Medical Devices Agency (PMDA) pour promouvoir un processus d’approbation des médicaments transparent et plus efficace.
- Renforcement des exigences vis-à-vis des laboratoires pharmaceutiques qui doivent désormais être physiquement présents sur le territoire national.
- Pour obtenir l’autorisation de mise sur le marché pour un médicament nouveau, les entreprises pharmaceutiques doivent démontrer leur capacité à garantir la sécurité, la qualité et l’efficacité du produit, ainsi que leur respect des bonnes pratiques de fabrication pratiques dans le cadre de la fabrication des produits déjà sur le marché.
- Accroissement de la réglementation et de la responsabilisation des laboratoires.
USA :
- Multiplication des opérations de contrôle à l’intérieur et à l’extérieur du pays ciblées sur marché noir, les pharmacies en ligne et les importations les plus risquées.
- Obligation pour les laboratoires de mettre à jour 2 fois par an les informations composant le code barre (NDC) de chaque médicament.
- Multiplication des inspections des lignes de production des médicaments importés.
- En 2008, l’Etat de Floride a adopté une loi anti-contrefaçon qui augmente les peines contre les récidivistes et ceux qui méprisent la vie humaine ou la sécurité en produisant notamment des faux médicaments.
Europe :
Médicrime : Le Conseil de l’Europe a élaboré une convention internationale qui constitue, pour la première fois, un instrument juridique contraignant dans le domaine du droit pénal.
Cette convention criminalise la contrefaçon, mais aussi la fabrication et la distribution de produits médicaux mis sur le marché sans autorisation ou en violation des normes de sécurité.
La Convention fait obligation aux Etats signataires d’ériger en infraction pénale :
- la fabrication de produits médicaux contrefaits ;
- la fourniture, l’offre de fourniture et le trafic de produits médicaux contrefaits ;
- la falsification de documents ;
- la fabrication ou la fourniture non autorisée de produits médicaux et la mise sur le marché de dispositifs médicaux ne remplissant pas les exigences de conformité.
Ouverte aux pays du monde entier, « Médicrime » propose également un cadre de coopération internationale et des mesures destinées à améliorer la coordination au niveau national.
Cette convention a été adoptée par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe, le 8 décembre 2010 et son ouverture à la signature est prévue pour le 28 octobre 2011.
Nouvelle directive : Le Conseil de l’Union Européenne a adopté en mai 2011 une directive (modification de la directive 2001/83/CE) visant à éviter que des médicaments falsifiés soient introduits dans la chaîne d’approvisionnement légale.
La directive donne 18 mois aux Etats pour transposer les nouvelles règles en droit national et notamment les dispositions suivantes :
- Médicaments soumis à prescription : Obligation d’apposer un dispositif de sécurité permettant de vérifier l’authenticité et d’identifier chaque emballage tout au long de la chaîne d’approvisionnement, ainsi que de déceler toute trace de manipulation.
- Obligation de soumettre la fabrication des substances actives, importées ou non, des médicaments à de bonnes pratiques de fabrication.
- Obligation pour tous es importateurs, les fabricants et les distributeurs de substances actives d’être enregistrés auprès de l’autorité compétente.
- Obligation pour les fabricants d’informer les autorités compétentes lorsqu’ils soupçonnent que des médicaments ont été falsifiés.
- Obligation pour les états membre de mettre en place des systèmes permettant de rappeler les médicaments falsifiés.
- Obligation pour les sites internet proposant des médicaments d’afficher un logo commun et de comporter un lien renvoyant au site internet de l’autorité compétente concernée, sur lequel doit figurer la liste des tous les revendeurs enregistrés.
France :
- Octobre 2009 : La présidence Française annonce le renforcement des capacités de détection et de saisie dans les colis postaux. Par ailleurs, le Service national de douane judiciaire (SNDJ) voit sa capacité d’investigation et d’intervention renforcée par le rattachement de médecins et d’inspecteurs de la pharmacie.
- Après la création en mars 2011 de groupes de travail spécialisés, le gouvernement français a mis en place en septembre 2011 un plan de lutte contre la contrefaçon des produits de santé, qui, dans le pays, passe surtout par Internet.
Ce programme comprend quatre axes : la coopération opérationnelle entre les services, l’action internationale, l’information statistique et la formation des agents publics et magistrats.
Parmi les mesures de ce plan, on peut mentionner :
- la création d’un fichier central des vols, détournements ou trafics de produits pharmaceutiques ;
- la constitution d’équipes d’enquête mixtes et la réalisation de contrôles conjoints par la police et les douanes ;
- le soutien aux programmes renforçant la sécurisation des circuits de distribution des produits pharmaceutiques, en particulier dans les pays en développement ;
- les actions de sensibilisation des consommateurs aux risques encourus.
- La création d’un véritable programme de formation pour tous les acteurs de la lutte : administrations et professionnels de santé, aussi bien dans les écoles ou à l’université qu’en formation continue.
- Suite à l’évaluation de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007 de lutte contre la contrefaçon, le Sénat français a rédigé en juillet 2011 une proposition de loi pour renforcer la lutte contre la contrefaçon. Cette proposition vise à apporter des précisions ou clarifications et surtout à améliorer encore la protection de la propriété intellectuelle en France.
Allemagne :
Blue Project :
Les douanes allemandes ont mis en place une initiative originale basée sur le croisement des informations issues de 4 sources différentes : internet, les organisations internationales, les laboratoires pharmaceutiques et les systèmes de paiement en ligne.
Menée depuis 2008, cette opération internationale cible spécifiquement le commerce des médicaments contrefaits sur Internet.
L’opération est basée sur l’indentification des sites illégaux de commerce en ligne de médicaments et le traçage des transactions financières. Elle permet ainsi de remonter jusqu’aux organisations criminelles qui sont à la source du trafic.
L’opération a nécessité notamment de suivre une transaction financière importante (environ 3 millions d’€) à travers 7 pays différents.
En avril 2010, après 18 mois d’enquête, l’opération avait donné lieu à :
- sept arrestations,
- la saisie de plus de 172 000 médicaments
- la saisie de près de € 390 000 en espèces
- la confiscation de 700 000 $ d’actifs.
Grande-Bretagne :
De 2007 à 2010, l’Autorité de régulation du pays, la Medicines and Healthcare products Regulatory Agency (MHRA) a conduit un plan de lutte contre la contrefaçon de médicaments. Ce dispositif comprenait les mesures suivantes :
- Renforcement des prérogatives du Groupe d’Application et de Renseignement (E&I group) chargé d’enquêter sur les violations de la loi sur les médicaments.
- Embauche de spécialistes dans la conduite d’enquêtes internationales, d’enquêtes financières, de criminologues, des enquêteurs sur Internet…
- Réalisation d’enquêtes approfondies en cas d’incidents
- Transparence de l’information et renforcement de la communication ciblée vers les professionnels de santé et le grand public sur les risques pour accroitre leur vigilance.
- Création d’une Hotline 24/24 pour signaler un incident.
- Renforcement de la concertation, de la collaboration et des échanges de renseignements avec les services de police (HMRC, SOCA…), les organismes internationaux (OMS, Impact, Interpol, Conseil de l’Europe…), fédération professionnelle de grossistes (BAPW), de distributeurs (BAEPD), des services postaux (Royal Mail)…
- Etablissement d’une liste de médicaments les plus souvent falsifiés.
- …
Danemark :
- Renforcement des contrôles des fabricants exportant dans d’autres pays de la communauté européenne.
Russie :
- Une loi promulguée en juin 2007 a permis d’arrêter des distributeurs et des pharmacies se livrant à la vente de médicaments falsifiés.
Inde :
- Intensification de la surveillance des zones à risque (frontières, marchés, campagnes…).
- Entre 2003 et 2008, l’Inde a révisé en profondeur son système de santé.
- En 2008, le gouvernement annonce la création d’une autorité centrale du médicament (ACD) entièrement autonome calquée sur le modèle américain de la FDA.
- Le gouvernement indien a reconnu la nécessité d’une surveillance plus stricte la réglementation de la fabrication de médicaments en Inde et a mis en œuvre un plan visant à améliorer les lois et règlements.
Chine :
- Durcissement des sanctions contre les actes de corruption au sein de l’administration et des autorités de santé.
- Respect plus scrupuleux et meilleur contrôle du traitement des demandes d’Autorisation de Mise sur le Marché. En 2007, la State Food and Drug Agency (SFDA) a annoncé que les sociétés pharmaceutiques avaient retiré plus de 7300 demandes d’enregistrement des médicaments, soit environ 24 % du total.
- Renforcement des exigences pour les octroies de licences de fabrication de médicaments.
- 2007 : lancement d’une campagne de répression. Plus de 300 fabricants contrefacteurs de matériels médicaux ou de médicaments sont contrôlés par les autorités et fermés.
Philippines :
- En 1996, la République des Philippines a adopté une loi spécifique condamnant la contrefaçon de médicaments. Les peines de prison et amendes sont modulées en fonction de la valeur marchande des produits contrefaits saisis, mais aussi s’il est avéré que l’un des faux médicaments a causé le décès de quelqu’un.
Qatar :
- Depuis juin 2011, le Qatar travaille à la création de la première loi visant à combattre et criminaliser la vente de médicaments contrefaits dans le pays. Si elle est adoptée, cette loi devrait être la première du genre au Moyen Orient.
Nigéria :
Entre 2001 et 2006 :
- Renforcement des pouvoirs de l’Agence nationale d’administration et de contrôle des aliments et de des médicaments (NAFDAC)
- Interdiction d’importer les médicaments à travers les frontières terrestres.
- Limitation des importations à deux ports maritimes et deux aéroports.
- Déclaration préalable par le transporteur de l’ensemble des marchandises auprès de la NAFDAC
- Création du « Réseau des Autorités de contrôle des médicaments de l’Ouest africain » (WADRAN), lieu d’échange pour les responsables des opérations de lutte contre la contrefaçon de médicaments dans la région.
Ouganda :
- Analyse systématique lot par lot de tous les médicaments destinés à traiter le paludisme et la tuberculose.